PasSage Visuel Officiel 2013

PasSage Visuel Officiel 2013
Création: Eric Pelosato

vendredi 18 janvier 2013

Carnet 1 - Rangoon et le spectacle

Carnet 1 – Rangoon
(Illustrations originales de Sarah Teulet, réalisées d'après les textes et photos envoyés en Basse définition.Un superbe travail à distance)
« Deux amis
Vivaient au Vélomotapa
L’un ne possédait rien
Qui n’appartint à l’autre.
Les amis de ce pays-là valent bien
Dit-on, ceux du nôtre. »

A l’ami Philippe Châtelain

Chronologie de ce nouveau périple en Myanmar
Samedi 12 janvier, le compte à rebours était plus que donné : photo sur l’esplanade du Trocadero, plein vent, grand froid et la pluie : « départ pluvieux, voyage heureux » me suis-je exclamé devant Pierre Martial, écrivain, journaliste et président de l’association franco-birmane pour le soutien de la Dame de Rangoon. (Si vous ne savez pas quoi faire de vos jeunes, moyens ou vieux jours, que vous vous sentez un brin sensible aux douceurs de ce pays, allez-y, contactez cette association et proposez vos services artistiques ou autres)

Dimanche 13 janvier, les deux sacoches de vélo à la main, j’arrive à l’aéroport Charles de Gaulle dans ma panoplie unique de Vététiste : aucune marque, juste un pantalon cycliste long et noir avec deux franges orangées, et enfilé dessous : le court qui fera les deux mois et le spectacle. Noir lui aussi. L’avantage du noir est l’aspect propre qu’il peut garder malgré la tonne de poussières dessus. Quant au Tigre, il se camoufle dans sa combinaison rose fluo en plastique, et disparaît dans la soute de l’avion. Sans broncher cette fois : tout se passe rapidement, sans avoir à l’endormir. Décollage à midi.
Lundi 14 janvier, 11h. Arrivée à Rangoon. Un calme olympien, pas étonnant : le temps de libérer le Tigre de sa peau protectrice, de lui resserrer les cornes sur le guidon et de remonter sa roue avant, de me laver les mains, les rabatteurs ont disparu du hall de sortie.

Et à 13h, l’Institut Français. Mon Tigre a de l’humour. Parce que…

Mon Tigre a de l’humour
(Pas  de photo pour illustrer le texte suivant, juste à sauter si l'on n'aime pas les dialogues)
Après 17h de vol, 15 km enchaînés sur la Pyay Road qui me mène droit vers le centre de la capitale, heureux hasard, l’Institut Français se trouve sur mon chemin. Guitare dans le dos, trempé, je pénètre dans une première cour. Sous un préau je laisse Tigre sans attache : « Tu restes là, tu ne rugis pas. C’est un Rendez-Vous important, pas d’extravagance. »

Je l’entends grincer du pédalier. Je le reprends d’un doigt sur la bouche. « Chut ! » Puis je m’avance dans la seconde cour : une tablée de dix jeunes personnes ont terminé leur repas et derrière un bar, deux serveurs.

« Madame Rose-Marie X*(*Nom ré-inventé), please », je leur demande un peu gêné d’arriver en fin de déjeuner. L’un des serveurs quitte le bar et se dirige vers la table. Aussitôt Rose-Marie se lève, souriante et s’approche. Je me présente, poliment de la part de Pierre Martial. Les yeux de Rose-Marie se lèvent vers le ciel, elle réfléchit : pas bon signe. Mais je poursuis mon explication quant à l’objet de ma venue à l’Institut Français.
« Ah, lâche-t-elle poliment. Ce n’est pas moi qui m’occupe de cette partie-là. Il faudra voir cela avec Mademoiselle « A ». (Je l’appelle A comme j’aurais pu la nommer « Rolande »). Nous sommes en plein calcul des budgets, poursuit Rose. Ces dix prochains jours sont les plus difficiles. Il faudrait prendre rendez-vous avec A.
-         Oui, bien sûr.
-         Je reviens. »

Rose-Marie recule alors de cinq pas, penche la nuque et s’adresse à une jeune femme, assise sur son siège, les bras ballants. La chaleur, il est vrai, est étouffante. Surtout après 15km de vélo et sans la monnaie du pays pour acheter une bouteille d’eau. Rose-Marie revient près de moi en cinq frétillantes enjambées :

« Pas avant jeudi, ça vous convient ? »

Je réfléchis à mon emploi du temps serré : 4 semaines pour traverser la Birmanie tout en donnant des spectacles, cela me paraît un peu juste si cela n’aboutit à rien. Je tente alors une réduction du temps de travail :

« Avant, ce n’est pas possible ?

Rose-Marie, tout aussi poliment, retourne cinq pas en arrière et se penche de nouveau vers la même personne, susurre et revient très vite :

« Non, elle me confirme que non, envoyez-lui par mél ce que vous proposez, un dossier. Ce sera plus simple »

« Plus simple ? me dis-je. Ah ! Parce que c’est… »… je coupe le son. « A » est donc cet étrange dos qui me toise de ses omoplates ? Je reste courtois. Et j’entends alors un rire déchaîné : un dérailleur qui feule. « Tais-toi, Tigre ! »

« Je vous dis à jeudi ? m’interroge Rose toujours très poliment.
-         Non, je ne pense pas, je réponds calmement. Merci de m’avoir accueilli et désolé de vous avoir dérangé. Au revoir et bonne semaine. »
Lorsque j’ai repris le Tigre en main, celui-ci gloussait. « Un rendez-vous important… » semble-t-il me dire. « Tais-toi ! » Que voulez-vous, cette Bête à deux roues a le sens de l’humour : les chiens ne font pas des chats. Encore moins des carpes !

 (Photo à gauche: au Bureau du NLD de Yangoon, avec Monsieur U Wyint Minh, directeur d'un nouveau Journal: Thamaga News)

A droite, toute !
Mardi 15. Après une nuit récupératrice dans un modeste hôtel du quartier Chinois, je consacre ma journée à découvrir Rangoon, capitale en voie de surconstruction. C’est la course au logement. On a construit d’abord du mastoc. A tel point que la surenchère du Moderne défigure les anciens quartiers. Parcourues la nuit, certaines ruelles au passé colonial en complète décrépitude, rappellent La Havane. Quant à l’ambiance générale, je suis bien dans cette Asie colorée, bruyante, animée et fluide. A vélo, je me faufile déjà entre les voitures et les klaxons. Je m’éclate à vrai dire. Un détail : leur volant est à droite et la conduite birmane est à droite ! Cherchez l’erreur. Mais c’est ainsi depuis une loi décrétée par un Militaire au pouvoir, superstitieux et de la gauche et de la pratique automobile. L’angle de vue des chauffeurs est donc « limite ». Il n’est pas étonnant qu’on vous frôle la fesse gauche.

Interlude
Je coupe le Carnet pour une dépêche qui m’arrive via-Facebook :

« DERNIERE MINUTE: Samedi, Pierre Martial, Président de France Aung San Suu Kyi, a donné le top départ, à partir de la place du Trocadéro à Paris, aux pieds de la Tour Eiffel, de l'Opération “La Birmanie à vélo”!

Lancement de l'opération “La Birmanie à vélo” par France Aung San Suu Kyi, à l'initiative de l'artiste de rue et globe-trotter humanitaire Pyerrot Prest


« C'est un doux rêveur comme nous les aimons! Un électron libre, un fou d'amour, un artiste nomade, un Buster Keaton à bicyclette, un Charlot à vélo!
Membre de France Aung San Suu Kyi et fondateur de la compagnie théâtrale Lavifil, Pyerrot Prest a décidé de traverser toute la Birmanie à vélo en donnant, à chacune de ses étapes, dans les rues ou sur des scènes de fortune, des spectacles de mime, pour les petits et pour les grands.

“J'aime apporter de la joie, faire rire et sourire, voir les yeux des enfants s'éclairer et ceux des plus grands s'étonner”, explique-t-il.

Ces dernières années, Pyerrot Prest a déjà traversé ainsi le Vietnam, le Cambodge et le Laos et il a chanté et apporté du bonheur aux enfants des rues et aux populations les plus défavorisées de ces pays.

Cette année, c'est la Birmanie qu'il va sillonner, d'un bout à l'autre du pays, à la découverte de ce fameux “réveil birman” et de ce peuple qui attend depuis si longtemps qu'on vienne le rencontrer, le soutenir et le découvrir. Il sera armé de son seul vélo, de sa guitare et d'un portrait d'Aung San Suu Kyi. Et à chacune de ses étapes, il jouera la comédie, dansera autour de sa bicyclette et jouera avec les enfants. Tout cela toujours gratuitement bien sûr. Et solidairement. Il dormira où il pourra. Il part à l'aventure. Comme il aime. Sans rien programmer à l'avance et en faisant confiance au destin, aux rencontres et à la chaleur humaine.

C'est sur la Place du Trocadéro, à Paris, sur le Parvis des Droits de l'Homme, face à la Tour Eiffel, que Pierre Martial a donné, au nom de France Aung San Suu Kyi, qui soutient l'opération de tout coeur, le signal de départ de cette drôle et émouvante expédition.

Le lieu n'avait pas été choisi au hasard car c'est là que les militants français et birmans se sont si souvent retrouvés au coude à coude, ces dernières années et qu'ils continuent de s'y rassembler régulièrement pour soutenir Aung San Suu Kyi et faire avancer toujours plus la démocratie en Birmanie et dans toute l'Asie. »

Eh bien ? (Acceptez que je fasse un silence après cette lecture. Pourquoi ? Pourquoi ? Mais parce que… j’ai la pression. Tout naturellement.) Sans me rendre compte, j’ai dressé la barre et morale et physique haut. Quoi qu’il advienne, l’aventure commence fort, les kilomètres en spectacles et les rencontres artistiques devront se faire, au millimètre près, dans la bonne humeur. Sans trop serrer les dents !

Fin de l’interlude. Reprise du Carnet
En toute complicité, Sarah (Teulet) choisira certaines photos de ce périple, envoyées avant la parution de chaque carnet et accompagnées d’un texte court ; photos qu’elle ré-inventera en fonction de son ressenti d’artiste peintre et illustratrice. Je sais d’avance que le résultera fera pâlir les clichés originaux. Et l’interactivité entre le récit du voyage et l’interprétation par Sarah dynamisera le Blog, ces Carnets d’un Rêvaliste.

« Trouver la clef » pour entrer dans ce pays est une circonlocution trop simpliste. Car encore faut-il se trouver devant la bonne porte ! Et pour comprendre la Birmanie, rien de plus « simple » que de s’asseoir et observer. Sans rompre la chaîne des sons qui en douceur vous enveloppent l’esprit, sans forcer de portes puisque celles-ci sont toutes ouvertes à l’étranger. Les Birmans sont de nature curieux, ils apprécient votre présence, elle les rassure. Peut-être.

Le Césame reste d’abord l’intime conviction que l’on a à se fondre dans le paysage, au milieu de ses visages souriants. Vous devenez celui qui contemple sans être repérable… Mal barré avec l’espèce de jupette que l’on m’oblige à porter, pour cacher le short cycliste. Ma dégaine créée le sourire auquel je réponds par le mien. Que voulez-vous, j’ai le sens de la dérision. Heureusement que Tigre Bleu ne m’a pas vu !



Shwedagon la coupole dorée
(Oh, les jolies prises de vue, chouette, n'est-ce pas?) Une promenade circulaire vous fera découvrir les différents temples de ce Haut lieu bouddhiste de Rangoon : un dôme doré à crever le ciel. Essayez de le fixer plus de 10 secondes sans cligner des yeux ! Après avoir grimpé l’escalier abritant vendeurs de bibelots et de boissons, vous arrivez au cœur de la cité : ça brille, ça envoie, ça déborde de couleurs, de statuettes. Allez, hop ! Pour les adeptes, gymnastique matinale : on prie, génuflexion. On bénit des mini Bouddha, mouvement des bras. On incante, très bon pour la gorge. On brûle des bougies, dextérité des mains. On se met en forme spirituelle pour toute la journée et plus, si le vœu est exhaussé. Tout me paraît si paisible et le temps fluide glisse entre vos mains. Mon œil se concentre sur ces rituels, essayant de me souvenir de chaque geste, de chaque ambiance, du visage de chacun, avec l’envie d’être le reporter des instants.

Un Tigre éveillé
Bien sûr que la Dame de Rangoon n’a pas besoin d’un gardien pour la protéger mais ce mercredi matin, Tigre a eu… un comportement. Point. Comme s’il avait senti le fauve enfoui dans son cadre bleu se réveiller. C’est bien simple : depuis que ce vélo a été remodelé techniquement par les périples précédents : les pédales du Vietnam, le dérailleur de Phnom Penh.., j’ai l’impression qu’il est habité par un je-ne-sais-quoi de mystérieux. De vivant. Avant que vous ne me jugiez comme définitivement demeuré catégorie Irrécupérable, je vous relate les faits. Tandis que je me rends au bord du lac Inya, je perds tout à coup le contrôle du guidon. Plus surprenant, les 27 vitesses s’enclenchent les unes après les autres sans que j’aie à lever le petit doigt ; les pédales tournent seules sans que je fournisse le moindre effort. Crocs et griffes sortis, de zigzag en virage serré, le vélo déjanté fonce à vive allure. Quand j’ouvre les yeux, je me retrouve devant un portail rehaussé de barbelés : je reconnais la maison d’Aung San Suu Kyi. Une histoire de plus, me direz-vous. « Objet inanimé, avez-vous une âme ? ». Non. Catégoriquement NON… sauf lui.

Fermez les yeux et imaginez la photo prise sur les lieux, que je garde comme unique preuve de ce singulier épisode cycliste.

Le spectacle : PasSage
A l’aéroport de Kuala Lumpur, une simple discussion avec une passagère à bord du même avion, Olivia "la Corse", m’a enrichi d’une adresse où je pourrais trouver des pianos! Et le Mercredi soir, je jouais pour l’Ecole de musique Gitameit Music School, piano sous la main. Ici, dans cette école, des étudiants y trouvent Prof et aussi un lit. Le Directeur enchanté, pour le lendemain, me propose de jouer le spectacle à l’école du Monastère. 300 enfants le lendemain jeudi. J’accepte. Bonne reprise dans une ambiance et un accueil chaleureux. « Pielo » le personnage se distingue à présent du spectacle « Adulte » et prend ses marques et de l’assurance ! « PasSage » c’est du « Multi Style », un spectacle multi carte, multi terrain, multi jeu, multi piste, multi rencontre : multi passe. Après la prestation, les accessoires rangés, je discute. Carte du pays au sol, entouré de prêtres Mongs et de professeurs et responsables, j’élabore mon parcours. Echange d’adresses mel, d’informations, je suis loin de l’accueil de l’Institut Français.


Prochaine Destination : Lago
Après un tour au Bureau Officiel du Parti d’Aung San Suu Kyi, deux rencontres : Monsieur U Win Myint, directeur du journal THAMAGA et Catherine Griss, photographe. Elle se trimballe avec des tonnes de sacs remplis d'appareils photos. Et son vice: vider les frigidaires pour mettre ses pellicules photos au frais! Merci pour le Plan Hôtel dont je tairai le nom... comme promis.

Lieux des spectacles et autres « petits dérapages artistiques »

Rangoon
-          Nord Est de Rangoon : quartier Yadanar, au bout de la rue Kanbe, Gitameit Music School
-          Pagoda Myin Tha Myo Do. Moastic Education and Youth Developement School
-       Coup de pub avec Tigre Bleu, costume et guitare, devant le Bureau Officiel du NLD avec photographe reporter
Bago
-          Monastry Ban Chang Kuung
Pyu
Quartier Général du NLD. Chansons autour d’un thé puis d’une complète collation

Nombre de kilomètres depuis l’arrivée à Rangoon : 515 km

Musiques écoutées : AC/DC, Karpatt, Muse, Gonzales, Arno, Beatles…

Techniquement cycliste: un câble de dérailleur foutu et changé près du lac Inya à Rangoon... j'ai connu pire comme décor.

4 commentaires:

  1. bonjour Pyerrot,
    ahhhhhhhhhhhhh enfin des nouvelles, nous commencions à nous inquiéter.Alors, l'aventure commence pas trop mal !!!
    L'hiver au soleil, tu as de la chance, ici ça caille...
    bises marie

    RépondreSupprimer
  2. Salut l'artiste,
    Je suis a Nhan Trang, depart dans 10minutes pour Dalat, nous c'est route motorises, nous avons une pense pour celui qui pedale. A bientot, bonne route et du succes pour ton projet.
    Bisoussssssssssssssssssssss
    Pierrot family

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Salut à toi, et je pense gagner le Cambodge vers le 4 mars.

      Supprimer
  3. Pyerrot
    A bangkok , j'ai investi dans un sac photo plus normal , merci pour ce clin d'oeil

    RépondreSupprimer

Laissez ici vos commentaires